Piero della Francesca, la Conversation sacrée

Piero della Francesca, la Conversation sacrée

 
 

DATES : 1472 – 1474. MATIÈRE ET TECHNIQUE : Tempera sur bois. DIMENSIONS : 251 × 172 cm. Les travaux de restauration et les études récentes ont confirmé que le format de l’œuvre a été réduit et que, dans les intentions de l’artiste, l’architecture était plus large et plus aérée tandis que les figures apparaissaient réunies sous une vaste abside. Malgré la réduction subie, l’œuvre est un résultat exemplaire des recherches perspectives menées par les artistes centro-italiens du deuxième XVe siècle (application de la spirale de Fibonacci pour redimensionner l’œuvre sans changer les proportions. Divines, forcément divines). LIEU DE CONSERVATION (depuis le pillage de Napoléon Bonaparte) : Pinacothèque de Brera, Milan, l’œuvre, considérée mineure par les Experts, fut jugée indigne du musée du Louvre !

Commande de Federico III da Montefeltro, duc d’Urbino, pour célébrer la naissance de son fils, Guidobaldo, en hommage à Battista Sforza, sa femme, morte en couches en 1472, à l’âge de 26 ans. La dimension biographique de l’œuvre l’emporte sur la dévotion religieuse. D’où le titre de Conversation sacrée : le commanditaire entre en prière avec la Vierge et les Saints pour qu’ils intercèdent pour le salut de l’âme de Battista et la survie de Guidobaldo.

Mais paradoxalement on n’entend que le silence, les lèvres sont serrées, les regards ne se croisent pas.

On reconnaît les saints à leurs attributs : À gauche : Jean-Baptiste (avec son bâton et sa peau de bête ; Bernardin de Sienne (avec son profil acéré caractéristique) ; Jérôme (avec sa tenue d’ermite). À droite : François d’Assise (et ses stigmates) ; Pierre de Vérone (et sa blessure à la tête) ; Jean l’Evangéliste (présentant son Livre.) Le commanditaire, à genoux au pied du trône de la Vierge, revêtu de son armure de Condottiere, encore dépourvu de ses armoiries qui ne lui seront remises par le Pape Sixte IV qu’en 1475, permet de dater le retable. 

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  • retable, originellement réalisé pour l’église San Donato degli Osservanti, Urbino, entre 1472-1474
  • transféré à la mort du Duc (1482) dans son mausolée, l’église San Bernardino, Urbino
  • tempera sur bois ; 248 × 170 cm
  • œuvre de la maturité, application à l’esthétique du savoir scientifique et synthèse absolue entre la peinture italienne (perspective) et la flamande (luminosité, détails réalistes.)
  • style sévère.

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L’architecture grandiose, dans laquelle prend place la Conversation sacrée est clairement inspirée de la grande voute à caissons de Leon-Battista Alberti (1404-1472), humaniste par excellence : homme de lettres, défenseur de la langue italienne, moraliste, mathématicien, mais surtout théoricien de l’art et architecte. (cf. Mantoue, basilique Sant’Andrea + Le Traité De re aedificatoria)

La parfaite maitrise des proportions est symbolisée par l’œuf suspendu dans la niche de l’abside ; son ovale se répète dans le visage impassible de la Vierge, placé au centre de la composition ; celle-ci est organisée autour :

  • d’un axe vertical (formé par l’œuf à l’aplomb de la Vierge et du nombril de l’enfant Jésus),
  • d’un axe horizontal (formé par personnages sacrés, organisés selon la règle de l’isocéphalie : nom donné à une règle esthétique utilisée dans les arts antiques quand il s’agit de représenter plusieurs personnages situés dans des positions ou des plans différents. Suivant cette convention, tous les personnages doivent avoir la tête au même niveau, située sur une même ligne.)
  • et d’un insolite point de fuite, placé en hauteur (au niveau des yeux de Marie), si bien que le point de vue du spectateur est en légère contre-plongée.

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L’importance que prennent chez les Anges les vêtements ornés de bijoux et les coiffures rehaussées de diadèmes ainsi que leur impassibilité, chargée de mélancolie, trahissent l’influence de Verrocchio et de son disciple, Leonardo da Vinci

Des influences flamandes se font sentir dans les détails réalistes et minutieux : luisant de l’armure, lanières de cuir rouge, tapis et bagues aux doigts de Federico. 

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Dans l’Homme en perspective – les Primitifs d’Italie(Paris, Hazan, 2008), Daniel ARASSE  parle de « science mathématique au service de la prière ». Et, de fait, il s’agit d’une habile démonstration de géométrie, sur deux plans : 

  • au premier plan, les personnages occupent toute la largeur du tableau, de part et d’autre de la Maestà qui occupe le centre ; cette disposition dessine des lignes horizontale et verticale qui confèrent à l’ensemble une raideur cérémonielle.
  • au deuxième plan, l’architecture monumentale d’une abside en berceau (pureté géométrique du demi-cercle et des caissons), autour d’une coquille Saint-Jacques renversée (pureté géométrique de la coquille) ; ce décor ombré souligne la mise en perspective du tableau et lui apporte des lignes semi-circulaires qui se répètent dans l’assemblée des personnages et dans les panneaux de marbre disposés en arc-de-cercle ; artifice de composition qui assure l’harmonie générale du tableau.

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À la fois œuvre d’artiste, de géomètre et de mathématicien, la Conversation sacrée s’appuie sur les lois de la géométrie théorisées par Alberti et honorées par Masaccio (la Trinité).

 

 

 

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